De la magie sur le terrain : une footballeuse qui change la donne dans le club le plus créatif de Paris
Athlètes*
Florine Kouessan est en train de former une équipe qui reflète son univers : le Witch FC.
« Pris sur le vif » est une série vous présentant des athlètes provenant des quatre coins du monde.
Chaque équipe de football a besoin de joueurs inventifs. Le Witch FC ne fait pas exception. Ce club parisien, formé exclusivement de femmes artistes et créatives, mêle joueuses expérimentées et novices.
Nous avons rencontré Florine Kouessan, écrivaine et créative figurant parmi les joueuses stars du Witch FC, sur le terrain de sport des jardins Saint-Paul, juste en face de l'église Saint-Paul-Saint-Louis, un édifice jésuite situé au cœur du Marais, à Paris. Florine évoque sa passion du jeu et sa rencontre avec une équipe improbable de créatives chaussées de crampons, en laquelle elle a trouvé sa communauté.
Comment t'es-tu intéressée au football ?
Mes parents sont originaires du Togo, mais je suis née à Paris. J'ai deux petits frères qui ont presque mon âge et nous formons une famille plutôt unie. Durant notre enfance, je partageais l'essentiel de mes loisirs et activités avec eux et d'autres enfants de l'immeuble. Quand on est enfant, il suffit d'avoir un ballon pour que tout se passe bien. Il n'y avait pas de filles avec qui je pouvais traîner, donc on me trouvait à coup sûr en train de jouer au football ou au basketball en bas de la tour, avec mes frères et les autres garçons qui habitaient le même immeuble que nous.
Comment se développe le football féminin en France ?
Quand j'étais plus jeune, le football était vraiment considéré comme une activité réservée aux garçons. D'ailleurs, mes frères blaguaient parfois en disant qu'ils ne voulaient jouer qu'avec d'autres garçons quand ils voulaient que je me sente exclue. Mais au fil des années, j'ai remarqué que les femmes réclamaient leur place. Entre les clubs professionnels qui suscitent plus d'attention, la Coupe du monde féminine qui s'est tenue en France l'été dernier et les médias qui mettent plus en avant les femmes… le football féminin qui était sous-estimé ne fait désormais plus du tout débat. Il semble maintenant logique de le voir à la télévision et dans les magazines.
Ces deux ou trois dernières années, j'ai constaté des choses que je n'aurais jamais imaginées. Je vois des publicités pour le football féminin et cela semble naturel. Je me réjouis d'avoir assisté à cette évolution car cela m'a motivée à bouger et à chercher une équipe féminine pour jouer de manière régulière. Même si j'adorais jouer, je ne m'imaginais pas rejoindre une équipe comme j'ai fini par le faire.
Parle-nous de Witch FC.
Witch FC, c'est un groupe de femmes qui aiment le sport, qui sont passionnées et qui sont prêtes à transmettre leur propre sensibilité à l'équipe. Nous sommes réunies autour du football, mais cette équipe est vraiment un moyen de valoriser chacune d'entre nous. Pour le club, nous voulions toutes un nom qui en impose, et les sorcières sont les icônes féministes par excellence. Mais, comme pour les équipes de roller derby, nous voulions un nom collectif, sans préciser de lieu [particulier].
Qu'apportes-tu à l'équipe ?
Je peux jouer avant-centre, au milieu ou en défense. J'adore me donner à fond et faire accélérer mon rythme cardiaque. J'aime aller d'une surface de réparation à l'autre et changer le cours d'un match d'un côté comme de l'autre. Le milieu de terrain me laisse la liberté de courir partout, de participer au match et même de faire la différence quand j'ai suffisamment d'énergie. Mes coéquipières disent que j'ai un bon niveau [d'énergie] et beaucoup d'engagement. C'est tout ce que j'attends du jeu. Je veux qu'elles comprennent que je participe à fond et que je m'amuse totalement.
« J'aime aller d'une surface de réparation à l'autre et changer le cours d'un match d'un côté comme de l'autre. »
Qu'est-ce que ça fait de jouer avec des personnes qui ont le même état d'esprit ?
Alors que la cohésion d'équipe se renforçait, nous avons commencé à nous serrer les coudes [aussi bien dans nos vies professionnelles que sur le terrain]. Par exemple, l'une d'entre nous a écrit le scénario dont elle avait toujours rêvé, une autre fait plus de peinture. Pour ma part, je commence les cours de théâtre avec une coéquipière… et ce n'est qu'un avant-goût de ce que la solidarité féminine peut nous aider à accomplir : réaliser nos rêves. La confiance en soi dépend énormément du soutien inconditionnel de nos amis.
Rédaction : Massaër Ndiaye
Photographie : Manuel Obadia-Wills
Reportage : octobre 2020