En bonne compagnie : Eyekonz

Communauté

Une équipe de jeunes filles de Philadelphie revendique sa place dans l'univers du lacrosse.

Dernière mise à jour : 21 octobre 2021
15 min. de lecture

En bonne compagnie est une série sur les équipes et les clubs qui remettent en question le statu quo.

« Je suis une force de la nature. »

« Je suis une bête. »

Trente filles font la queue devant un miroir en pied, sur un terrain de Mander Playground dans le quartier de North Philadelphia. Une par une, elles s'avancent vers le miroir tandis que leur coach, Jazmine A. Smith (Coach Jaz), encourage chacune d'elles à « se regarder droit dans les yeux » et à se complimenter. Et l'entraînement ne peut pas démarrer avant qu'elles ne l'aient fait.

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Coach Jazmine Smith et Erin Mobley

C'est une technique de renforcement de la confiance en soi qu'utilise Eyekonz Sports, la ligue de lacrosse et de hockey sur gazon que Coach Jaz a créée pour les filles de la région de Philadelphie, afin de permettre à davantage de femmes de couleur de pratiquer un sport majoritairement blanc.

En cette soirée de semaine, un vent frais signale le début de l'automne qui, en temps normal, coïncide avec la rentrée scolaire. Mais en ces temps de Covid, ces entraînements représentent les seules vraies interactions en personne pour la plupart de ces filles. Âgées de 5 à 18 ans, elles commencent par faire des tours de terrain, les aînées ouvrant la voie et les plus jeunes traînant à l'arrière, jusqu'à ce qu'on leur demande de former deux groupes en fonction de leur âge. Alors qu'on commence à entendre les filles bavarder entre elles, Coach Jaz coupe court à tout cela. « C'est quoi la capacité d'écoute ? », demande-t-elle. Et les filles répondent à l'unisson : « Une question de vie ou de mort. »

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Coach Jaz et son équipe

Ancienne joueuse de hockey sur gazon et de lacrosse ayant grandi dans cette ville, Jazmine, 43 ans, était souvent la seule fille noire de son équipe. Des années plus tard, en entraînant l'équipe d'un club local, elle réalisa que la diversité sur le terrain n'avait pas du tout évolué. « Je me suis dit que rien n'avait changé, explique-t-elle. C'est ridicule. » En 2019, les athlètes féminines de couleur représentaient seulement 16 % de tous les joueurs de lacrosse de 1re division. 2 % étaient noires.

Les aînées démarrent les exercices qui consistent à courir en gardant la balle dans la poche de la crosse. Quelques-unes des jeunes recrues font tomber des balles sur le terrain. Mais Nyobi Murphy, 15 ans, fait des allers-retours en agrippant la crosse avec assurance. Près d'elle, Ayanna Reese, 18 ans, gardienne de but, est en train de préparer le matériel pour le prochain exercice de l'équipe. Plus tard, lorsque les filles s'entraînent en binôme à ramasser des balles au sol, Erin Mobley, 15 ans, court sur place pour rester aux côtés d'une plus jeune et l'encourager alors qu'elle a du mal à manier sa crosse. Nyobi, Ayanna et Erin sont les piliers de l'équipe. Ces trois jeunes femmes incarnent tous les idéaux pour lesquels Eyekonz a été créé : le dévouement envers ce sport, l'équipe, la communauté et soi-même.

Nous avons parlé de solidarité féminine, d'affirmations et du fait de vaincre les préjugés.

À la rencontre de l'équipe

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Coach Jazmine Smith
Athlète de longue date, Coach Jaz a toujours mis un point d'honneur à faire ce qui est juste : « J'ai des convictions très fortes en termes de défense des droits et de justice raciale. » Quand elle était adolescente, la représentation inégale des différentes origines raciales au sein de son sport favori la travaillait. Pendant des années, elle s'est demandé comment elle pouvait augmenter le nombre de filles noires dans l'univers du lacrosse et du hockey sur gazon. C'est ce qu'elle fait avec Eyekonz, tout en veillant également à ce que chaque joueuse ait tous les outils pour réussir, que ce soit sur le terrain ou dans la vie. « On utilise le sport comme un mécanisme pour faire en sorte que les enfants soient bien sur le plan scolaire, explique-t-elle. Mais également pour les aider à avoir une bonne estime de soi. »

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Kai Coleman, 17 ans
« Je ne savais même pas ce que c'était, le lacrosse », explique Kai en se souvenant à quel point elle était nerveuse à son premier entraînement. « Il y avait tellement de filles et elles étaient toutes tellement douées. » Selon ses propres mots, Eyekonz lui permet de gagner en assurance et d'évacuer l'énergie négative qu'elle a en elle. « Même quand tu as eu une dure journée, l'entraînement de lacrosse te donne l'occasion de créer quelque chose de positif, affirme-t-elle. C'est euphorisant. »

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Nyobi Murphy, 16 ans
« Mon premier entraînement avec Coach Jaz a été une toute nouvelle expérience pour moi », explique Nyobi. Auparavant défenseure dans l'équipe de son école, elle explique : « On ne me faisait jamais de critiques. On me disait toujours : "Beau travail, tu te débrouilles très bien". Alors que [Coach Jaz], elle, disait plutôt : "Tu es une excellente joueuse, mais…" et ça, c'était nouveau pour moi. » Très bonne milieu de terrain aujourd'hui, Nyobi est reconnaissante envers sa coach pour lui avoir appris à accepter les critiques et à en tirer des leçons : « J'ai la sensation qu'elle me donne les outils pour que je puisse faire de grandes choses dans le futur. »

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Keyla Jordan, 15 ans
Source constante de légèreté pour ses coéquipières, Kayla est décrite par Coach Jaz comme « un petit clown amusant la galerie. Elle fait ce qu'elle a à faire, mais en même temps, elle essaye toujours de rendre les choses plus légères, explique Coach Jaz. Elle apporte un bon équilibre aux filles. Elle a vraiment un cœur pur. »

Anai'ya Baskerville, 17 ans
La maman d'Anai'ya aujourd'hui décédée, Rosalyn, a amené sa fille dans l'équipe Eyekonz il y a près de quatre ans. « Plus jeune, quand j'étais dans la voiture avec ma mère et mes frères et sœurs, elle avait transformé en chanson les affirmations "Je suis", explique Anai'ya. On la chantait tout le temps. »

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Sophia Poole, 15 ans
Sophia a été l'une des plus jeunes à intégrer Eyekonz, Coach Jaz n'étant autre que sa mère. Elle avait cinq ans lorsqu'elle a commencé à jouer au lacrosse et il est clair qu'elle a hérité de la volonté et de la détermination de sa maman. « J'apprends encore à m'entraîner avec mon asthme, explique-t-elle. C'est clairement un point faible. » La milieu de terrain veut jouer en 1re division de lacrosse depuis son entrée au collège, et elle affirme que ce sport lui a appris à mieux communiquer. « Ça m'a permis de m'exprimer différemment », ajoute-t-elle.

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Dayana Allen, 16 ans
« Tu peux être sûr que si elle a la balle, elle va la faire circuler d'une manière ou d'une autre », affirme Coach Jaz en parlant de Dayana, une attaquante tenace qui espère jouer en 1re division. « Elle a les capacités pour être une excellente meneuse sur le terrain. » Mais pour la préparer à cela, il lui faut de la discipline. « Il y a beaucoup de douleurs liées à la croissance parce que ce sport ne ressemble à aucun autre, explique Coach Jaz. Elle commence à gagner en maturité et à comprendre ce qu'est le vrai amour. »

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Naomi Green, 16 ans
Lorsqu'elle réfléchit à son rituel d'équipe préféré, Naomi explique que les affirmations « Je suis » ont changé l'image qu'elle a d'elle-même. « Quand j'ai découvert cette technique, je me suis dit : "Oh, c'est bizarre de se parler à soi-même." Mais plus tard, j'ai commencé à le faire chez moi à la maison, et à y croire. »

Ayanna Reese, 18 ans
« C'est vraiment la colle qui fait tenir toute l'équipe ensemble », explique Coach Jaz à propos d'Ayanna. La gardienne de but à la voix douce s'est mise à ce sport peu après que Coach Jaz l'a repérée à l'école et encouragée à faire un essai.

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Erin Mobley, 16 ans
Erin a rejoint Eyekonz après avoir découvert le lacrosse dans un camp pour débutant après l'école. « C'était complètement différent avec Coach Jaz, explique-t-elle. Je suis contente d'être venue ici, parce que je me sens moi-même, après chaque saison, je remarque l'évolution. » Active sur le terrain et en dehors, Erin est membre de la Eyekonz Legal Coalition et a contribué à l'organisation d'une marche de soutien en faveur du mouvement Black Lives Matter durant l'été 2020.

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Naja Johnson, 16 ans
« Pour chaque joueuse, c'est bien plus profond que de monter sur le terrain, explique Coach Jaz. Chaque enfant vient avec quelque chose qui l'empêche d'atteindre un certain niveau de réussite sur le terrain. » Dans le cas de Naja, ses coachs ont fini par apprendre que cette athlète talentueuse a été placée dans des familles d'accueil. « Avant de rejoindre Eyekonz, je songeais à arrêter le lacrosse, mais Miss Jaz m'a poussée à continuer. [Eyekonz] a été une planche de salut parce que parfois, tu as juste besoin d'aide et de soutien », affirme la récente recrue.

Quand vous parlez de vos coéquipières, vous employez le terme de sœurs. Est-ce que vous avez l'impression de faire partie d'une seule et grande famille ?

Nyobi : On est toutes pareilles : on est toutes des Afro-Américaines qui aiment ce sport et qui veulent le pratiquer et le maîtriser. Coach Jaz disait toujours qu'on marche sur les traces de nos ancêtres quand on joue sur ce terrain. Le fait qu'on se considère comme des sœurs nous donne la sensation qu'on a les mêmes ancêtres et qu'on doit travailler ensemble comme une vraie famille.

« Elles ne se contentent pas d'ouvrir la voie pour elles-mêmes, elles montrent aux personnes qui ne leur ressemblent pas qu'on a notre place ici. »

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De gauche à droite : Nyobi et Nyla Numan

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De gauche à droite : Nyla et Nyobi

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De gauche à droite : Nyobi et Nyla Numan

De gauche à droite : Nyla et Nyobi

Comment accueillez-vous de nouveaux membres dans l'équipe et leur transmettez-vous cet esprit de famille ?

Coach Jaz : Notre programme est ouvert toute l'année, alors n'importe qui peut nous rejoindre à tout moment. Il y a un système de marraine pour que les nouvelles ne se sentent pas isolées. Celles qui intègrent une nouvelle équipe partent généralement parce qu'elles ne connaissent personne. Les marraines sont là pour les guider pas à pas, faire les présentations et de là, elles se sentent plus à l'aise et sur la même longueur d'onde que l'équipe.

Nyobi : Erin, on n'a pas déjà été marraines ?

Erin : Je crois que j'ai été la marraine de tout le monde ici.

Quels sont les autres rituels de l'équipe Eyekonz ?

Toutes : Les affirmations « Je suis ».

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Dayana Allen

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Adriana Britt

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Dayana Allen

Adriana Britt

Parlez-moi des affirmations « Je suis ».

Nyobi : C'est une tradition pour avoir davantage confiance en soi sur le terrain. Coach Jaz tient ce grand miroir, et on doit se regarder, être la plus sérieuse possible et se dire à soi-même : « Je suis… ceci ou cela. » Tu peux dire : Je suis forte, Je suis belle, Je suis une bête, Je suis une force de la nature. Celle-là, c'est la préférée de Coach Jaz.

Je remarque que lorsque les nouvelles le font, elles ont généralement déjà des problèmes de confiance en elles, et elles n'ont pas l'habitude de se parler sérieusement à elles-mêmes. Coach Jaz te met face au miroir, et elle va attendre que tu te regardes droit dans les yeux. Elle te dira : « Change de posture, change le ton de ta voix. Garde les épaules bien en arrière. » Elle fait en sorte qu'on puisse se regarder soi-même en ayant confiance en soi et en sachant qu'on est de jeunes athlètes exceptionnelles, et qu'on peut faire tout ce qu'on pense être possible.

Comment est-ce que les affirmations « Je suis » vous donnent l'assurance nécessaire pour surmonter les difficultés que vous rencontrez sur le terrain et dans la vie ?

Nyobi : On est pour ainsi dire minoritaires dans ce sport, alors on doit avoir la stabilité mentale nécessaire pour pouvoir se mesurer à d'autres personnes qui pratiquent probablement ce sport depuis qu'elles sont nées.

Coach Jaz :
La plupart du temps, on joue contre des équipes où il n'y a que des Blancs. Pratiquer ce sport, c'est un peu briser des plafonds de verre. Elles ne se contentent pas d'ouvrir la voie pour elles-mêmes, elles montrent aux personnes qui ne leur ressemblent pas qu'on a notre place ici.

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De gauche à droite : Nyobi, Ayanna, Erin

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Ayanna Reese

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De gauche à droite : Nyobi et Erin

Comment ça se passe quand vous jouez dans des quartiers principalement blancs ?

Ayanna : Parfois, ils sont sympas, et parfois pas. J'ai l'impression qu'ils ont peur du fait qu'on soit effectivement bonnes dans ce sport. Une fois, quand j'étais dans les buts, j'ai arrêté le tir d'une fille et son père s'est mis en colère parce qu'elles perdaient.

Coach Jaz : J'ai toujours connu cette ville [dans laquelle on jouait] comme étant très raciste. À ce stade, Ayanna avait arrêté peut-être six buts et ce père est devenu rouge de colère et a explosé. Il a jeté quelque chose et a commencé à foncer sur le terrain en direction de nos joueuses. L'arbitre était là, mais il était sur le point de la pousser. J'ai dû aller sur le terrain, et l'arbitre lui a dit : « Sortez du terrain ou j'appelle la police. » C'était horrible d'assister à ça, mais ça a été une expérience formatrice.

Ayanna : J'étais juste choquée et perdue durant toute la scène.

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De gauche à droite : Vivian Saintil, Milan Smalls, Erin

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De gauche à droite : Vivian Saintil, Milan Smalls, Erin

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De gauche à droite : Vivian Saintil, Milan Smalls, Erin

De gauche à droite : Zorah Bradford, Millia Bonney, Nyobi, Sonia Diaz, Ayanna, Azeezah Jones

Comment est-ce que vos coéquipières vous aident à aller de l'avant ?

Nyobi : On aime toutes ce sport, et c'est vraiment le moment où on se retrouve. On s'assoit, on respire. Quand on se fait des passes, quand on attrape la balle, on se parle tout le temps, on prend des nouvelles les unes des autres, on parle de nos vies.

Ayanna :
Parfois, mes angoisses me rattrapent et je commence à cogiter, et je ne viens même pas. Elles m'aident à avoir une meilleure estime de moi-même, elles me disent que je peux le faire, que je joue bien.

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De gauche à droite : Kai, Tatiana Walker, Keyla, Erin et Qadan Johnson

L'été dernier, Eyekonz a organisé une marche en faveur du mouvement Black Lives Matter. Comment vous est venue cette idée ?

Erin : On voulait faire quelque chose pour sensibiliser les gens à la cause des femmes noires qui ont été brutalisées par la police. C'est une coéquipière Eyekonz qui en a eu l'idée lors d'une conférence Zoom, et on a toutes réfléchi à la manière de mettre ça en place.

« On est pour ainsi dire minoritaires dans ce sport, alors on doit avoir la stabilité mentale nécessaire pour pouvoir se mesurer à d'autres personnes qui pratiquent probablement ce sport depuis qu'elles sont nées. »

Nyobi : Coach Jaz a dit : « On peut le faire, vous devez organiser tout ça. » Et avec un peu de dons et un bon coup de collier, on a réussi à concrétiser tout ça. J'ai l'impression que ça nous a beaucoup inspirées. On a réalisé qu'on pouvait concrétiser une idée. À la base, c'était seulement une jeune Afro-Américaine qui a été touchée par ce qu'elle a vu et par la brutalité dont pouvait faire preuve la police à l'heure actuelle dans le monde entier. Le fait de donner vie à cette idée et d'être capables d'en faire une vraie coalition, une marche reconnue de partout, je crois que (ça va me faire pleurer), je crois que c'était vraiment important pour nous.

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Erin Mobley

Qu'est-ce que vous avez appris en organisant cette marche ?

Nyobi : Qu'on peut tout faire à condition d'y croire, tant qu'on a l'idée et qu'on est prêt à faire avancer les choses et à faire ce qu'il faut pour y arriver.

Comment est-ce que vous avez fait face en tant qu'équipe quand le maire a fermé la ville fin 2020 ?

Coach Jaz : On s'est remises aux entraînements Zoom, ce qui permettait aux filles de rester en contact les unes avec les autres. Mais malheureusement, c'est aussi à ce moment-là que Rosalyn, la mère d'Anai'ya, est décédée. Je lui ai parlé avant qu'elle n'aille en soins intensifs, et cette conversation m'a glacé le sang. Elle m'a dit : « Coach, n'oublie pas. Fais en sorte d'amener Anai'ya jusqu'à l'université. » Elle toussait, et je lui ai répondu : « Détends-toi et ressaisis-toi, pour que tu puisses te sentir mieux. » Et peu après cette discussion, elle est allée en soins intensifs. C'était horrible.‎

Il y a eu des funérailles et on savait que les filles ne pourraient pas aller à l'office religieux. On a décidé de former un cortège à l'extérieur de l'église pour que les filles puissent brandir des affiches. Quand Anai'ya, Cookie et Adriana sont sorties, elles ont pu voir que leur équipe était là pour les soutenir.

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De gauche à droite : Adriana et Katelyn Britt

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De gauche à droite : Nyla et Qadan

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De gauche à droite : Adriana et Katelyn Britt

De gauche à droite : Nyla et Qadan

Aujourd'hui âgée de 8 ans, Adriana a déjà trois ans d'entraînements de lacrosse à son actif. Attirée à l'origine par ce sport simplement pour être avec sa grande sœur, elle sait aujourd'hui qu'elle aime réellement être sur le terrain. « Ça me permet de faire plus d'exercice, de manger sainement », explique Adriana en énumérant les raisons pour lesquelles elle aime Eyekonz. « C'est quelque chose que ma coach m'a aidée à faire. »

Les sœurs reprennent le chemin de l'entraînement, en marchant avec la détermination d'une équipe qui sait qu'en étant unie, elle peut accomplir tout ce qu'elle veut : les championnats d'état ou même une marche en faveur des Noirs.

Jazmine jette un œil sur le terrain et fait signe à une jeune joueuse qui est en train de courir sans grand enthousiasme, avec ses cheveux longs détachés se balançant autour de son visage. La coach lui dit de relever ses cheveux, mais la fille proteste : elle n'a pas d'élastique et elle vient de faire son brushing. « Écoute », lui répond Jazmine en empruntant un élastique à une fille sur le banc de touche et en rassemblant les cheveux de la jeune joueuse en une queue de cheval. « Tu es une athlète, et les athlètes ne doivent pas avoir les cheveux dans le visage. » Après avoir fait preuve de douceur et de fermeté à la fois, elle indique à la joueuse de lacrosse débutante le chemin sur lequel elle courait et lui dit de faire le dernier tour avec conviction. Les joueuses d'Eyekonz mettent la barre très haut, et s'encouragent ensuite mutuellement à la franchir.

Rédaction : Roxanne Fequiere
Photographie : Laurel Golio, Gillian Laub
Vidéo : Gillian Laub, Meerkat Media

Date de première publication : 24 septembre 2021